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Recensement 1790

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2 .   D E M O G R A P H I E

Une pyramide des âges grignotée.


La démographie est l'étude de la population considérée comme un facteur générateur de sociologie et de puissance. Elle ignore les individus et ne connaît que les catégories définies par le sexe, l'âge, le niveau de vie ... C'est essentiellement une science du nombre, fondée sur des informations statistiques.

Le premier travail de compilation des renseignements contenus dans le recensement de 1790 a consisté à répartir la population suivant les âges et le sexe (à remarquer que le sexe a pu être déterminé à partir du prénom, ou à défaut par l'état matrimonial). Ce dénombrement a permis l'établissement d'une pyramide des âges (jointe en annexe) qui sera la base d'une analyse démographique sommaire, mais à notre avis démonstrative.

Cette pyramide des âges n'a pas une forme sectionnée en tranche due aux effets de catastrophes (guerre ...), mais est plutôt grignotée en dents de scie. Les guerres, comme celles de la succession d'Autriche (1741-1748), n'envoyèrent que peu de miliciens sur les fronts distants. Mais malheureusement le fort taux de mortalité était néanmoins entretenu en permanence par les famines et les épidémies.

Les années 1740-1743 furent marquées en Bretagne par des accès de misère et de pauvreté. D'après le "Journal d'un curé de campagne" du pays nantais, "l'année 1740 avait été remarquable par l'hiver le plus dur et le plus long qu'on ait jamais vu de mémoire d'homme". 1741 ne valut guère mieux : cette année-là, la dysenterie coûta la vie à environ 80000 personnes en Bretagne et dura sept mois. A cela s'ajoutait la famine liée aux mauvaises récoltes.

Après une courte accalmie, les crises et les épidémies redevinrent régulières à partit de 1760 et provoquèrent un excédent de sépultures jusqu'à la fin du siècle. Parmi les origines de ces épidémies, certaines furent accidentelles : le typhus apporté à Brest par des équipages contaminés en 1757-1758. Le développement de la Dysenterie et de la Typhoïde a peut-être été favorisé également par l'augmentation de la pluviosité dans la seconde moitié du 18e siècle.

Une autre cause plus importante était l'absence presque totale d'hygiène. Et recourir aux mèdecins, qui ne guérissaient pas souvent et coûtaient toujours cher, répugnait à nos bons paysans. D'autre part, les habitations étaient faiblement abritées du vent, dans des creux où l'eau croupissaient trop facilement.

Les épidémies atteignaient en premier lieu les enfants en bas âge qui étaient bien moins armés contre la maladie. Le taux de mortalité infantile s'élevait à un niveau qu'on devine anormal à la longueur des "marches basses" de la pyramide qui diminue très vite. De plus, les évènements (hiver frois, mauvaises cultures, épidémies) sont lisibles les années mêmes de leurs apparitions. Les creux les plus accentués et les plus profonds ont correspondu à un déficit des naissances dû aux épidémies qui sévissaient alors.

Ergué-Gabéric, et la pyramide des âges de 1790 est une preuve supplémentaire, n'a pas échappé au fléau décimateur des épidémies, mais on note cependant quelques particularités. La crise de la seconde moitié du 18e siècle semble avoir commencé plus tart qu'ailleurs vers 1760-1770. De même, l'épidémie fut enrayée à Ergué-Gabéric avant sa disparition complète dans le reste de la région de Quimper.

En 1786, le sieur Kerjean, chirurgien des épidémies envoyé dans la comme d'Ergué-Gabéric par le subdélégué de Quimper, déclarait que, malgré les 86 malades qu'il y avait soignés : "il semblerait qu'elle ait été moins maltraitée que la paroisse de Briec, cependant par le nombre de convalescents que j'y ai trouvé en arrivant ... Ergué-Gabéric a autant souffert que Briec" et il concluait que "la maladie est la même partout".

Un autre aspect, plus fréquent et moins imprévu, relatif à la situation démographique de 1790, était la supériorité en nombre des femmes (52.12% de la population totale). Ce fait était beaucoup plus marqué dans les âges extrêmes : moins d'un an et plus de soixante ans. Les femmes de plus de 60 ans étaient presque deux fois plus nombreuses que les hommes du même âge, ce qui indiquait une espérance de vie plus longue pour le sexe féminin. Les femmes les plus âgées avaient 75, 76 et 78 ans, mais le doyen était un homme de 86 ans, âge extraordinaire pour l'époque.

De même, le rapport de masculité (rapport des naissances de sexe masculin sur celles de l'autre sexe) s'élevait seulement à 47.9, ce qui veut dire que pour un garçon à venir au monde naissaient plus de deux filles. Les conditions en 1790 étaient idéales pour le renouvellement des générations à la condition que toutes ces filles trouvent mari. En fait, il faut plus y voir un accident génétique au cours de l'année même du recensement, plutôt qu'une situation durable.

Plus constant était le taux de natalité, très forte en cette fin du 18e siècle. Le nombre des jeunes de moins de vingt ans était considérable : 43% de la population totale. Certes la mortalité infantile était élevée, mais elle n'a pas empêché pour autant l'arrivée des nouvelles générations et l'inflation des jeunes.

Ergué-Gabéric connaissait donc en 1790 un équilibre démographique à grosse dépense d'énergie (forte natalité et forte mortalité) typique des sociétés agraires traditionnelles. Les taux élevés correspondants, caractéristiques d'une population prémalthusienne aux conditions sanitaires médiocres, s'inscrivaient dans la grande crise qui a affecté la Bretagne dans les trois dernières décennnies du 18e siècle.

Mais la situation démographique, aussi destructrice qu'elle fut, a créé à cette époque un niveau de peuplement relativement élevé. Un effectif de 1609 habitants correspondait à une densité de 40 personnes au km2. Dans les années 1870 la commune ne comptait guère plus de 2.200 habitants. Ensuite, après une pointe à 2828 en 1911, le nombre d'habitants s'est stabilisé aux envisons de 2.500 de 1935 à 1965. La population d'Ergué-Gabéric n'a franchi le seuil des 3.500 habitants qu'en 1971.